Balade aux Philippines 3

Chapitre 3 - Un otage encombrant
mardi 31 janvier 2006
par  Alex Cordal
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Le journaliste prit son air des jours sombres.

– On vient d’apprendre que le NAKA, le mouvement indépendantiste philippin vient de commettre une nouvelle action d’éclat qui, pour la première fois, touche un ressortissant français. Il aurait enlevé Brigit Fergusson, la célèbre actrice de films érotiques. Nous n’en savons pas plus pour le moment, mais nous ne manquerons pas de vous tenir informés de cet enlèvement dans nos prochaines éditions. Rappelons seulement que le NAKA n’en est pas à son coup d’essai. Dernièrement, il avait pris en otage le consul de Thaïlande à Manille, et ne l’avait libéré qu’au bout de cinquante-deux jours, moyennant une rançon dont le montant a été tenu secret.

Dans la villa de Manille, Marco regardait le journal télévisé de France 2. Grâce au satellite, il pouvait constater en direct que l’AFP avait bien reçu son télégramme. Il devait reconnaître que l’idée de son boss d’enlever une personnalité non politique était une variante intéressante. Pas de garde du corps à neutraliser, une facilité pour choisir l’heure et l’endroit du rapt. Vraiment, ça fonctionnait aussi bien, et c’était beaucoup plus facile. Il avait même été surpris de la rapidité dont les évènements s’étaient déroulés. Quand il avait reçu le message de Buncho l’informant que Brigit Fergusson était arrivée à Triniko et se trouvait enfermée dans la cabane à otages, il admettait que pour une fois les guérilleros du NAKA avaient bien bossé.

Marco avait été chargé par son boss de gérer toute l’affaire. Il était heureux de cette marque de confiance. Il se versa un whisky et le sirota tranquillement en regardant par la fenêtre. De l’étage, il apercevait par-dessus le haut mur d’enceinte de la propriété, les toits des maisons du quartier résidentiel de Manille. La villa était un véritable bunker. Pour le moment, il n’y avait rien à cacher dans les lieux, mais autrefois la cave avait abrité un atelier de fabrication de faux billets, ce qui justifiait la protection du site. Au début des enlèvements, il avait d’abord été envisagé de séquestrer les otages dans la cave. Techniquement, c’était parfait. De même que les hauts murs et le système d’alarme empêchaient les curieux d’entrer, ils interdisaient aussi toute évasion. Mais, le patron de Marco avait préféré la solution Triniko, bien plus discrète. Marco ne pouvait que se féliciter de cette décision, car peu de temps après le premier rapt, il avait été réveillé en pleine nuit par une perquisition de police. Les agents du gouvernement n’avaient bien sûr rien trouvé, ce qui avait par la même occasion permis de brouiller les pistes. La mafia philippine, un temps soupçonnée d’être de mèche avec le NAKA, ce qui était la vérité, fut mise hors de cause pour cette affaire. Dès lors, la villa avait retrouvé une tranquillité dont Marco se réjouissait.

Du haut de son mètre quatre-vingt-cinq, Marco scruta l’horizon. Là-bas, au loin, il imaginait Brigit Fergusson aux mains de Buncho et de ses hommes. La petite bonne femme devait être terrorisée. Mais, il savait qu’elle ne risquait rien. Il connaissait bien les quatre guérilleros. Ils n’étaient pas très intelligents, mais ils étaient loyaux et disciplinés. Les consignes de ne pas toucher aux otages surtout quand il s’agissait de femmes étaient respectées. Ce ne devait pourtant pas être l’envie qui manquait aux quatre indépendantistes de profiter de l’actrice porno. Marco se souvint que plusieurs fois, Buncho lui avait réclamé un peu de distractions sexuelles pour lui et ses hommes, mais il hésitait toujours à leur amener une putain. Personne ne devait connaître Triniko. Une fille aurait pu avoir la langue trop longue à son retour.

Marco referma la fenêtre et décida d’aller se coucher. Selon le plan bien établi, demain le gouvernement connaîtrait les revendications du NAKA, et surtout le montant de la rançon demandée pour la libération de Brigit Fergusson. Marco suivrait les évènements par la radio et la télé. Il jugea inutile de se rendre à Triniko avant plusieurs jours. C’était suffisamment loin et le voyage par la route trop éreintant pour y faire une simple visite de contrôle. Machinalement, il porta son regard sur les revues posées sur la table du salon. La coïncidence était amusante, la première page affichait une photo de Brigit Fergusson avec en titre « l’actrice X fait encore parler d’elle ». Marco avait déjà lu l’article qui relatait un des derniers caprices de la comédienne. La couverture est toujours d’actualité, se dit en lui-même le grand homme brun en souriant.

°°°°°°°

À Paris, c’était l’agitation dans le bureau du ministère des affaires étrangères. Les services du ministre étaient en contact permanent avec le gouvernement philippin. Les revendications du NAKA avaient été transmises par ce dernier. Comme d’habitude, dans un premier temps, l’administration de l’archipel se refusait à toute concession politique vis à vis des indépendantistes, quant à la rançon, il excluait tout paiement pour le moment, même par la France.

Après avoir longuement interrogé Homère Belbit et ses collaborateurs sur les lieux du tournage, les policiers philippins avaient relevé quelques incohérences dans cette affaire, et en avait fait part à leurs homologues français. En effet selon l’équipe de tournage, deux comédiennes avaient disparues, la célèbre actrice Brigit Fergusson et une obscure comédienne de second plan. Pourtant, le NAKA ne revendiquait qu’un seul enlèvement. Les ravisseurs s’étaient-ils débarrassés de ce témoin gênant sous prétexte qu’il était sans intérêt en comparaison de l’énorme vitrine médiatique que représentait Brigit Fergusson ? Où alors, fallait-il penser que la deuxième femme était complice du rapt ? Ces réflexions poussèrent les autorités des deux pays à ne pas rendre publique cette seconde disparition. Toute l’équipe du film fut sommée de garder le silence au sujet de Valérie.

Deux jours plus tard, Alex Denon faisait son entrée dans les bureaux du Quai d’Orsay. Alex était bel homme. Grand, des cheveux châtains, le regard vif, il appartenait à l’Organisation. Ancien mercenaire, il avait rejoint cette structure depuis deux ans, et se plaisait à y travailler.

L’Organisation était une sorte de service d’espionnage privé. Bien qu’il s’en défendît, le gouvernement français, comme tant d’autres, faisait souvent appel à elle dans des situations délicates. C’était le cas aujourd’hui, la France avait promis de rester à l’écart de cette affaire et de laisser agir les autorités philippines. Alex Denon qui possédait un passeport dominicain était l’homme chargé d’enquêter secrètement sur l’affaire. Il ne bénéficiait d’aucun soutien logistique de son commanditaire, et si par malheur, il était découvert, il était censé travailler pour son propre compte. Inutile de préciser qu’Alex Denon exerçait un métier dangereux, mais qui lui plaisait prodigieusement.

L’espion avait un double objectif : tenter de retrouver les disparues, et enquêter sur le rôle de Valérie Berthier. Cette femme était-elle victime ou complice du NAKA ? L’employé du ministère remit un énorme dossier à Alex Denon. Il contenait tous les renseignements qu’avait collectés la police en quarante-huit heures. L’homme pris congé du fonctionnaire et quitta les lieux par une porte donnant sur une impasse. Il ne devait être vu de personne.

De retour à son hôtel, Alex se mit à étudier le dossier. Toute la vie de Brigit Fergusson d’abord. Issue d’un milieu favorisé, la célébrité avait une existence sans histoire. Sa vie était d’une banalité ennuyeuse. Les coups d’éclat qui balisaient sa carrière, ces dernières années depuis qu’elle était devenue célèbre, étaient très superficiels. Ce n’étaient que des coups montés pour faire parler d’elle dans la presse. Mais à ce propos… Alex réfléchit : et si l’enlèvement était du même acabit ? Si Brigit avait organisé son rapt pour qu’on parle d’elle ? Et si l’autre était, non pas complice du NAKA, mais de connivence avec l’actrice ? Une piste à ne pas écarter.

L’autre, justement. Alex prit son dossier. Une illustre inconnue, une arrivée toute récente dans le porno, mais un passé plus intéressant. Divers délits mineurs vers l’âge de seize ans, prostitution à vingt ans. Voilà qui nous ouvre des horizons d’enquêtes, pensa Alex. Il tourna la page et découvrit un portrait en noir et blanc de la jeune femme. Il contrastait avec les notes précédentes car il dégageait une incroyable innocence. Un joli minois, un air candide, des longs cheveux noirs bouclés, Valérie parut sympathique à l’espion. Il ne savait pas pourquoi ce portrait l’accrochait. Habituellement, il restait imperturbable à la vue d’une photo quand il étudiait une affaire. Le reste du dossier était sans intérêt, c’est pourquoi Alex décida de rendre une visite à l’appartement de Valérie. Peut-être y découvrirait-il quelque chose de plus consistant.

Les serrures ne résistèrent pas à la doigtée de l’agent secret. Une fois dans l’appartement, Alex entama une fouille méthodique. De la cuisine à la salle de bain, du salon à la chambre, tout fut minutieusement étudié. Au gré des découvertes aléatoires, Valérie devenait plus familière à l’espion. Les réserves alimentaires, les livres de la bibliothèque, la marque des pilules contraceptives, les nombreuses lettres de candidatures revenues accompagnées d’un refus, toutes ces indications banales ou intimes contribuait à mieux cerner la personnalité de la jeune femme.

Alex découvrit dans un tiroir le dernier press-book de la comédienne. Il commença à le feuilleter machinalement. Quand il arriva aux photos dénudées qui avaient contribué à la convocation au casting du film d’Homère Belbit, Alex marqua un temps d’arrêt.

– Putain, les nibards ! murmura-t-il en son for intérieur.

Il ne put retenir un sifflement d’admiration en examinant la photographie où les deux mains de Valérie relevaient ses seins comme pour les offrir au lecteur. Les poitrines opulentes l’avaient toujours fait fantasmer. Là, il était servi ! Désormais certain de ne rien trouver de plus pour son enquête, il s’octroya un instant de relâchement. Il fouilla l’armoire pour recenser les sous-vêtements de la comédienne. Il examina les soutiens-gorge pour vérifier la taille des bonnets. La lecture des étiquettes confirma ses intuitions : des seins comme il les aimait ! Il se surprit à bander. Son imagination débordante l’avait déjà propulsé dans un fantasme où il se trouvait écrasé par les grosses mamelles de la comédienne. Il inspecta ensuite la pile de slips, certains étaient très sexy, mais d’autres carrément ringards. L’effet fut moins intense, malgré une conclusion évidente qui s’imposait quant au volume des fesses.

Décidément, il lui était difficile de croire que cette fille était une crapule, en revanche, il lui était plus facile de s’imaginer au lit avec elle. Alex referma l’album. Il s’apprêtait à le ranger, puis se ravisa. Il l’emporta en se disant hypocritement que ces photos pourraient enrichir le dossier.

°°°°°°°

La routine s’était installée à Triniko. Déjà trois semaines que les deux comédiennes, juste vêtues de leurs sous-vêtements, étaient enfermées dans leur cabane au fin fond de la jungle philippine. Valérie s’était même parfaitement bien adaptée, elle s’était habituée à vivre la poitrine à l’air, et positivait sa détention. Les guérilleros n’avaient fait aucun mal à leurs prisonnières. Ils les nourrissaient bien, même si les repas n’étaient pas très variés et essentiellement à base de riz et de boîtes de conserve. En revanche, Brigit passait ses journées, prostrée dans un coin de la pièce. Valérie avait tenté de faire la paix, allant jusqu’à s’excuser de son attitude pourtant justifiée. Mais Brigit ne voulait rien entendre, ses seuls propos étaient du style :

– Tout ça est de ta faute ! Tu me le paieras ! Je me vengerai !

Valérie avait donc pris le parti de faire comme si rien n’était. Pour l’instant, elle se baladait à poil dans la pièce, elle venait de laver sa petite culotte derrière le rideau des WC. Elle avait utilisé le savon et l’eau de la cuvette qui avaient servi à sa toilette. Il faut dire que l’hygiène laissait à désirer à Triniko. Les deux femmes ne pouvaient se laver que tous les deux ou trois jours, et inutile d’espérer pouvoir prendre une douche !

La nature reprenait ses droits. En l’absence de rasage, la toison pubienne de Valérie avait commencé de repousser. Les poils encore courts dessinaient désormais le triangle noir naturel combattu par les lames de rasoir depuis plusieurs années.

Soudain, un moteur se fit entendre. C’était un véhicule qui arrivait. Le bruit s’arrêta. Valérie se dépêcha de renfiler son slip encore humide. Il était temps. La porte s’ouvrit et Kamgué apparut sur le seuil.

Dehors, l’imposante silhouette de Marco s’était dépliée du siège de la jeep. L’homme était descendu de son véhicule. Il se dirigeait vers Buncho venu à sa rencontre pour l’accueillir.

– Vous avez bien bossé les gars ! lança Marco. J’ai attendu que les évènements se tassent un peu pour venir. Bon alors dis-moi, ça ce passe bien ? Comment va la fille ? Elle est en bonne santé ?

– Tout va bien, Marco ! Personne n’est malade. Elles sont en pleine forme ! Surtout la brune, celle qui a des gros nichons !

Marco fronça les sourcils. Buncho semblait parler de plusieurs prisonnières. Il ne devait pourtant n’y avoir qu’un seul otage : Brigit Fergusson.

– Comment ça « Elles » ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire de brune aux gros nichons ? Brigit Fergusson est blonde. Et j’espère que toi et tes hommes vous ne l’avez pas touchée !

– Non ! Non ! T’inquiète pas, Marco ! On obéit aux ordres !

Kamgué interrompit la conversation.

– Elles sont prêtes ! annonça le Guérillero. Je leur ai bandé les yeux et attaché les mains dans le dos.

Plutôt que de chercher des explications dans un dialogue de sourds, Marco préféra entrer dans la cabane pour se rendre compte par lui-même. Il découvrit l’une à côté de l’autre, les deux femmes debout, les mains dans le dos et les yeux bandés. Malgré le morceau d’étoffe qui masquait la moitié du visage de la blonde, Marco reconnut immédiatement Brigit Fergusson. Il savoura le tableau. L’actrice du X en petite tenue en face de lui, il n’était pas prêt d’oublier. Puis son regard se porta sur sa voisine. Il se demanda un instant pourquoi, elle ne portait pas de soutien-gorge, tout en appréciant la nudité de ce buste qui offrait un spectacle d’opulence mammaire assez exceptionnel. Il oublia vite son interrogation qui n’aurait eu de conséquences fâcheuses que si elle avait concerné Brigit Fergusson. La dignité de la seconde femme n’avait aucune importance. Un seule chose comptait : sa présence ne devait pas être une gêne à l’opération. LIRE LA SUITE

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