Cri - 2

Fragments 2 - L’envoutée
mardi 9 février 2010
par  Christine Arven
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Ainsi que mon Maître me l’avait demandé, je m’étais apprêtée avec grand soin pour cette soirée dont pour l’instant je ne savais rien mais qui, sans aucun doute à cause justement de cette ignorance, m’emplissait d’une chaude fébrilité.

Maître JPS est ainsi. Il aime entre tout me surprendre et il prend donc un immense plaisir à me concocter avec gourmandise des surprises qui m’ébahissent et me font frétiller d’aise. Aussi, pour ne pas gâcher un tant soin peu notre plaisir commun, je m’étais bien gardé de lui poser la moindre question sur la soirée que je m’apprêtais à vivre avec lui, même si celles-ci menaçaient de déborder de ma tête tant elles étaient nombreuses.

La seule chose qu’il avait condescendu à m’indiquer, plus par nécessité d’ailleurs que par réelle envie, était que je devais prévoir, dress code oblige, une tenue telle qu’on l’attendait d’une soumise que son Maître sort ce qui avait eu le don de mettre mes nerfs à vif et de transformer ma fébrilité et excitation non moins délectable.

Parmi mes nombreuses tenues, mon choix s’était vite fixé sur un corset en brocard bleu roi décoré d’arabesques dorées et sur une jupe en pane de velours noire qui bien que recouvrant mes pieds n’en était pas moins idéale pour la circonstance puisque, étant largement fendue depuis la taille devant et derrière, elle laissait le plein accès à mes jambes gainées de fin bas noirs eux-mêmes ornés d’une large bande de dentelle. Pour les chaussures, j’avais hésité entre une paire d’escarpins et des cuissardes en cuir noir et m’en étais donc remise au choix de mon Maître qui, après une courte hésitation, avait opté pour les cuissardes.

A sa demande, j’avais lourdement fardé mes yeux de noir ce qui, paradoxalement, avait, par contraste, éclairci mon regard et coloré ma bouche de pourpre. Après avoir noué, comme il se doit, autour de mon cou mon collier serti de strass et enserré mes poignets et mes chevilles de bracelets de cuir noir, un voile de parfum était venu compléter ma tenue. Un bref regard dans le miroir m’avait pleinement satisfaite sur mon apparence à la fois suggestive et sage et, en tout cas, fort « appétissante ». Vraiment, mon Maître serait fier de sa chienne soumise et cela ne pouvait que me combler. J’avais maintenant hâte de parader ainsi vêtue au bras de M_JPS et sentir sur moi des regards appréciateurs me scruter tout en sachant que seul mon Maître avait le droit de me toucher vraiment et que, dans tous les cas, rien ne se ferait sans son approbation. Sentiment très doux d’appartenance et de dépendance qui me fait vaciller d’émotion quand j’y pense et m’emplit d’une joie infinie. Sensation à la fois sécurisante et grisante que de me dire que je suis à lui que j’ai choisi pour Maître et qu’avec lui rien ne peut m’arriver de mauvais. Quoi qu’il puisse se passer, je sais que mon Maître est là pour veiller sur moi. Je peux donc sereinement et en toute tranquillité me laisser aller et profiter, sans qu’aucune arrière-pensée ne vienne les parasiter, de ces moments magiques que nous partageons où le plaisir l’emporte immanquablement sur la douleur éprouvée.

Dans la voiture qui nous emporte vers notre destination, M_JPS devient plus disert et m’annonce que nous nous rendons à l’inauguration d’un club où doit se dérouler une soirée BDSM. Mon cœur fait un bond à cette annonce. Mon Maître va donc m’exhiber devant un large public et cette perspective m’affole au moins autant qu’elle m’excite.

—  Ce sera l’occasion pour moi de te présenter à tous mes amis ou, du moins à la plupart. Il devrait y avoir pas mal de monde, me dit-il sans se douter de l’émoi que ces quelques mots somme toute bien anodins suscitent en moi.

Non seulement c’est pour moi une première puisque jamais encore je n’ai eu, quelque désirs que j’en ai eu, l’occasion de participer à ce type de réunion mais l’idée d’être, en outre, confrontée à tous ces gens que connait mon Maître m’intimide soudain. Mon regard se perd songeur sur la campagne environnante plongée à cette heure de la soirée dans l’obscurité. Je me sens soudain bien nue et bien vulnérable. Et si je ne me montrais pas à la hauteur ? Et si je ne plaisais pas à tous ces gens qui allaient me regarder, me jauger, me comparer à S. l’ex compagne de mon Maître qui devait aussi être là m’indique-t-il augmentant d’un cran mon anxiété.

—  Un dernier test, me dit-il, mais tu n’as rien à craindre, ma chienne. J’en connais déjà le résultat !

Certes… De toutes mes forces, je m’accroche à la certitude de ce lien qui nous unit si fort. Qui nous a unit si vite et de manière si incontrôlable. Comme une vague inexorable qui balaie tout sur son passage, jusqu’à la plus élémentaire protection, et qui, aujourd’hui, me laisse totalement découverte face à lui qui m’est devenu si vite si indispensable. Partie intégrante de ma vie et de mon équilibre. Mais… si je ne supportais pas la comparaison…. Et si mon Maître se rendait finalement compte qu’il était encore attaché plus qu’il ne le croit à cette femme… Je sais ce qu’il m’a dit et que je crois, que je veux croire par toutes les fibres de mon être et de mon cœur, et qui devrait, qui doit me rassurer. Mais je sais aussi toute la force du lien amoureux même rompu pour ne pas prendre la mesure du risque encouru. Pourtant, en même temps, en dépit de mes craintes, je ressens en moi une extrême jubilation. Au diable mes craintes et mes interrogations…. Je me sais séduisante. Et, sous le regard de mon Maître, je me sens véritablement belle et sûre de moi. Prête à me battre et de chienne devenir tigresse pour le garder près de moi. Il n’y a aucune raison pour que je craigne quoi que ce soit ou qui que ce soit. Et puis, surtout, ce qui me donne une immense force est le sentiment d’amour que mon Maître et moi éprouvons l’un pour l’autre qui est bien réel et ne repose pas sur des chimères. Je sais, comme lui connait le mien, la force de son attachement pour moi sa soumise… sa chienne… sa catin… sa salope, son attention sans faille à mon égard et cela vaut toutes les armures. Oui vraiment ! Aucune raison pour moi d’avoir peur puisque mon Maître est là pour veiller sur moi. Il me l’a promis et je le crois.

En entrant dans le club, une vague d’appréhension me submerge de nouveau et noue mon ventre. Nous gravissons un étroit escalier et là une foule compacte nous accueille qui interpelle mon Maître. Vraiment, si j’avais encore les moindres doutes, ceux-ci tombent entièrement. Mon Maître est très connu ! Impossible pour nous de faire un mètre sans que quelqu’un nous arrête pour nous dire bonsoir. Mon Maître me présente, « Voici Cri, ma soumise » Je sens ma tête tourner un peu et je me demande comment je vais bien pouvoir faire pour retenir tous ces noms. Mais qu’importe, cela viendra avec le temps… Pour l’instant je ne veux que profiter de l’instant présent. Des sourires, des regards francs me mettent en confiance. Je suis bien accueillie sans, semble-t-il, la moindre arrière-pensée. Nous croisons enfin le Maître des lieux, Maître A. qui est à l’initiative de cette soirée et l’a organisée. Là aussi, accueil chaleureux. Il se rappelle que nous nous étions une fois parlé au téléphone. C’est vrai. Je m’en rappelle aussi. Les circonstances avaient fait que nous en étions restés là sans concrétiser une véritable rencontre. Je lui dis mon plaisir de faire enfin vraiment connaissance mais déjà il nous entraîne à sa suite vers une grande salle. Je regarde autour de moi. Subjuguée par le décor.

La vaste salle circulaire décorée de draperies noires et de rouge est déjà occupées par de nombreux couples aux tenues toutes plus provocantes les unes que les autres où se mêlent cuir, vinyl, voile translucide…

Beaucoup, comme moi portent autour de leur cou le collier marque de leur appartenance à un Dom ou une Domina. Déjà, à un angle un Maître lie soigneusement autour du corps de sa soumise d’épaisses cordes. Elle est debout, immobile, les yeux mi-clos, bras déjà retenus croisés en arrière. Un léger sourire éclaire son visage détendu. De temps à autre son Dom se penche vers elle et lui murmure quelques mots à l’oreille. Nul besoin pour moi d’entendre ce qu’il lui dit pour savoir qu’il lui demande si tout va bien, s’il peut continuer… Le brouhaha feutré des conversations est noyé par une musique syncopée dont je sens les accords sourds résonner en moi. Au centre de la salle, sur une estrade, une large vasque d’eau dont je me demande à quoi elle va servir… « Il y aura une exhibition de water-bondage » nous indique Maître A. devant mon air interrogateur. Bien… Disséminés dans la salle, des chandeliers surmontés de bougies nimbent l’ambiance d’une chaude lueur chatoyante à la fois envoutante et mystérieuse. Disposés un peu partout, des instruments tous plus effrayants et excitants les uns que les autres que la clarté des bougies auréole de reflets inquiétants : croix de Saint-André, piloris, chevalets, suspension, chaînes suspendue au plafond… Déjà, ployée en avant le cou enserré dans les étaux de bois, une soumise est fustigée par son Maître. Ces soupirs m’électrisent et font jaillir au creux de mes jambes une chaude moiteur. Je me demande si mon Maître me fouettera ainsi devant tous offrant à la vue de tous les lettres de son nom qu’il a gravées, en signe de possession incontestable, sur mes fesses dans l’après-midi à l’aide d’une aiguille. La pensée que je porte ainsi, incrustée dans ma chair la signature de mon Maître, sa marque de propriété, me fait tituber d’émotion. Mon esprit divague un instant vers d’autres marques plus indélébiles, plus définitives… mais bien sûr, je n’en dis rien… nous avons le temps pour nous et je n’ai nulle envie de précipiter à tort les choses au risque d’en amoindrir la portée et la signification. Mais là, ce soir, vraiment, je veux que tous voient et admirent cette marque de lui sur moi que je suis si fière d’arborer.

Nous entrons dans une autre pièce, plus petite, plus sombre. « La chambre des supplices » nous indique Maître A. ce qui a le don de faire bondir mon cœur. Au fond, un arceau en métal noir agrémenté de boucles et de mousquetons. « Idéal pour le fouet » précise comme s’il en était besoin Maître A. Un grand lit rond à droite recouvert d’un drap blanc réservé aux jeux de cire de toutes sortes. Sur la gauche, légèrement surélevé, un autre lit recouvert lui de cuir rouge. « Juste à la bonne hauteur pour pouvoir appliquer cravache ou martinet sans se fatiguer » ironise Maître A. en me regardant un sourire aux lèvres. J’aurai dans la soirée l’occasion effectivement de tester l’installation et éprouverai un bonheur infini à sentir les lanières de cuir fustiger mes fesses et mêlerait mes cris et mes soupirs à ceux de K., consentante compagne de supplice, qui, agenouillée à mes cotés, recevra le même traitement assené avec une violence qui me fera frémir.

Mais déjà, d’un retentissant coup de gong, Maître A. bat le rappel annonçant le début de la soirée. Il se tient sur l’estrade tout habillé de noir. Avec dans la voix, une note d’excitation jubilatoire, il invite toutes les soumises et soumis de l’assistance à se munir d’une bougie rouge et à se disposer en cercle autour de l’estrade en une farandole de fragiles lumières vacillantes. Je sens mon cœur battre. Je suis bien… détendue… Du regard je cherche mon Maître perdu dans l’assistance. Mais nulle inquiétude en moi. Je sais, je le sens au plus profond de moi, qu’il est là les yeux rivés sur moi. Certitude qui fait naître un sourire de bien-être sur mes lèvres. Perdue dans mes pensées, j’écoute à peine ce que dit Maître A. et ne revient à la réalité que lorsque je l’entends demander aux Dom présents de se positionner derrière leur soumis et soumises à qui il est demandé de s’agenouiller et de présenter leur croupe dénudées.

Commence une étrange orchestration alors que les mains s’abattent dans une cadence de plus en plus soutenue sur les fesses offertes. Plus vite… Plus fort…. Encore plus fort… Je sens mes fesses encore sensibilisées par le traitement qu’elles ont subi dans l’après-midi, s’embraser. Mais pour rien au monde je ne veux demander grâce et flancher. Au contraire je m’arc-boute davantage offrant mon cul à mon Maître pour qu’il le fasse rougir comme il aime et y appose l’empreinte de ses mains comme moi j’aime tant. Pourtant, je sens le rythme faiblir comme si mon Maître hésitait à m’octroyer cette fessée que mon corps réclame. Plus tard, il me dira, que les lettres tracées sur mes fesses avaient recommencé à saigner et qu’en aucune manière il ne voulait m’infliger une punition trop sévère qui m’aurait fait souffrir inutilement. Comme je l’aime quand il me parle ainsi et que je ressens au tréfonds de mon ventre toute l’attention qu’il me porte et le soin qu’il prend de moi sa soumise alors même qu’il m’inflige des traitements qui susciteraient la plus profonde réprobation de la part des couples dits « vanilles » mais qui nous ravissent et nous unissent si intimement. Sait-il qu’en agissant ainsi, il pulvérise toutes mes appréhensions, toutes mes défenses et qu’il ouvre grand le chemin vers des contrées qui, pour être plus arides et dures, plus effrayantes n’en sont pas moins fascinantes et attirantes. Je sens alors mon cœur chavirer et je n’ai qu’une envie, me laisser emporter par cette houle qui monte inexorable brisant sur son passage tous les barrages et le laisser me guider, frémissante et consentante, là où il veut m’emmener. Si peu de temps pourtant et je suis allé si loin déjà avec lui, incapable de réfréner l’élan qui me pousse vers lui, Le Maître que je chéris et aime.

Alors que ses mains s’abattent au rythme de la musique sur mes fesses relevées, une autre musique m’emplit aux accords déchirants et émouvants, d’autres paroles qui psalmodient ma joie d’être sienne et de me soumettre. Je sens le bonheur irradier mon visage et suis incapable de retenir le sourire qui nait au fond de moi et la clarté sereine qui illumine mon regard. Comme mes appréhensions étaient vaines et futiles. Je suis à cet instant précis, ainsi agenouillée devant mon Maître, à la place qui m’est dévolue. Je suis là où je dois être. Je suis avec celui avec qui je dois être. Et que m’importe ce qu’on peut en dire ou en penser. Le lien qui nous unit est si fort, fait de tendresse et de violence, d’amour et de fièvre, qu’il se rit des quand dira-t-on. A cet instant précis, je me sens indestructible et cette force qui m’habite c’est à lui, Mon Maître, que je la dois qui a su si bien me redonner le goût du bonheur et confiance en l’avenir.

Mais je dois me relever. Ma tête tourne des émotions trop fortes qui la remplissent, je titube, ploie et ses bras se referment autour de moi m’enserrant dans un étau d’amour alors que nos bouches se mêlent. Envie de rire soudain… je suis bien… je le suis confiante et fière et la soirée continue ainsi entrecoupée de conversations, de rencontres, de jeux qui me voient de nouveau exulter… lacérations des lanières de cuir sur mon dos qui allument en moi des gerbes de feu, étincelles bleutées de l’électricité qui me font tressaillir et sursauter alors que, accoudées à une rambarde, je surplombe la salle où se déroulent d’autres jeux tout aussi émouvants : soumise soigneusement liée qui s’envole dans les airs, soumis, cou entravé que l’on fouette consciencieusement. Tout autour de moi, des cris, des gémissements, des soupirs. Sifflement des lanières… Claquements des mains, bruit de chaînes. Mais l’ambiance loin d’être effrayante est chaleureuse emplie de connivence et de complicité. Aucun geste équivoque, pas de paroles ambigües ou déplacées. La courtoisie, en dépit de la brutalité apparente de certaines situations, est de mise. Je suis soumise, c’est mon rôle, celui qui me va le mieux et dans lequel je m’ébroue chienne heureuse de l’être, mais à aucun moment je ne ressens le moindre irrespect, la moindre grossièreté à mon égard.

La soirée passe, sereinement, sans aucune fausse note. Moment de quiétude alors qu’assis côte à côte nous nous restaurons ou, accoudés au bar, nous désaltérons d’une coupe de champagne. Les heures s’écoulent et, à chaque instant, mon cœur débordant de tendresse, je n’en reviens de la chance que j’ai eu de l’avoir rencontré lui mon Maître chéri qui m’apporte et me donne tant et tant, de l’avoir suivi ce jour de janvier où nos chemins se sont croisés. De la chance qu’il m’ait accepté comme sa chienne soumise, Sa Cri éperdu d’amour et de reconnaissance pour ces heures, ces émotions qu’il me fait vivre et toutes celles qui restent à vivre.

Car il y aura d’autres soirées, d’autres envoutements que nous partagerons avec d’autres ou jalousement entre nous deux seulement retranchés dans le confort feutré de son appartement dans lequel au fil des jours je me sens de plus en plus chez moi. Oui, il y aura d’autres fois, d’autres rencontres mais ce qui importe, ce qui est essentiel est que nous soyons ensemble lui le Maître et moi sa soumise liés par ce lien d’amour et de possession qui paraît si étrange, si incompréhensible à ceux qui sont à l’extérieur et ne peuvent comprendre mais qui nous fait vibrer à l’unisson et nous lamenter quand nous sommes séparés.

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Retrouver l’intégralité de ce récit dans le livre (EBook ou broché) paru sous le titre :
CRI : Fragment d’une soumission





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Commentaires

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jeudi 11 février 2010 à 13h24 - par  M_JPS

Une fois de plus, tes mains qui sont les miennes, ont parfaitement relaté cette merveilleuse soirée à l’envoutée.

D’autres rencontres et d’autres récits sont à venir pour notre plus grand plaisir.

Je te garderai près de moi ou je te sortirai, non pas pour te montrer comme un « animal de spectacle », mais pour faire voir ce que nous ressentons l’un pour l’autre et faire comprendre, à ceux qui en douteraient que le bonheur existe.

Je t’aime, ma chienne.

M_JPS

Site web : Toi, mes mains