Un Lion et une Marquise

1° Rencontre
vendredi 19 juillet 2019
par  Christine Arven
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Il fait nuit noire lorsque je monte dans la voiture. Il n’est pourtant que 19h. Mais, en cette fin octobre, la nuit tombe si vite. Moi qui goûte tant sentir la brûlure du soleil sur ma peau, je n’aime pas cette saison de l’année, annonciatrice de l’hiver, du froid, des jours trop courts...
Je jette un coup d’œil autour de moi sur les passants qui se hâtent sur le trottoir resserrant frileusement autour d’eux leur manteau. Un frisson me parcourt qui me rappelle que je suis quasiment nue sous le mince imperméable dont je me suis couverte et dont les pans, sans que j’y prenne garde, se sont écartés m’exposant ainsi au regard de curieux. Frissons de froid bien sûr mais aussi d’inquiétude à l’idée de ce qu’on peut penser à me voir ainsi dévêtue en pleine ville au volant d’une voiture mais pas seulement... Il faut bien en convenir j’aime ces situations d’exhibition qui me donne un sentiment aiguë de vulnérabilité.
Je me rappelle.
Il m’avait dit qu’il avait trois demandes à me faire insistant sur ce mot de « demande » qui me laissait le choix de faire ou de ne pas faire.... Mais formulées ainsi, ni lui ni moi n’en étions dupes, ses demandes n’en devenaient que plus exigeantes....
Au bout du compte, il y en eut plus de trois dont celle, qui me fit hausser les sourcils de surprise et esquisser une moue dubitative alors même que je sentais une lueur de connivence poindre au fond de mes pupilles, de faire le trajet, soit près de 50 km, vers lui seulement revêtue de mes sous-vêtements recouverts d’un simple manteau que, bien évidemment, je devais m’abstenir de boutonner. Demande pour le moins saugrenue mais qui, pouvait-il en être autrement, ne pouvait que m’enchanter....
Maintenant, je me demande si cela était vraiment une si bonne idée ! Que va-t-il penser de moi qui vais arriver chez lui dans cette tenue pour le moins indécente ? J’ai peut-être trop vite acquiescé. J’aurais dû, peut-être, montrer plus de réserves... J’aurais dû..... Trop tard maintenant de toute façon. Je ne me vois pas retourner au magasin et me rhabiller ce qui reviendrait à avouer ma faiblesse. Assumer ce désir qui est autant le sien que le mien ! Ne pas en avoir honte. Mais bon, il n’en demeure pas moins que soudain une sensation à la fois stressante et excitante me submerge. Lui, quand j’arriverai, sera habillé...
Concernant mes sous-vêtements il m’avait expressément demandé de porter « pour le plaisir de les voir s’envoler » soutien-gorge et, alors que je me dispense allègrement de cet accessoire, culotte. Il m’avait toutefois laissé « toute latitude, pourvu qu’ils me plaisent.... » ! Il m’incombait donc de faire le bon choix... celui qu’il escomptait de moi... Lourde responsabilité...
Je m’étais donc longuement interrogée sur ce que j’allais mettre pour la circonstance afin de ne pas le décevoir dans son attente de moi. Guêpière qui aurait le mérite, outre le coté sexy, de dissimuler mon ventre que je trouve trop rebondi, ou soutien-gorge et string qui eux auraient l’avantage de me découvrir davantage ? Puis je me suis rappelé qu’il me voulait « tout au naturel », J’ai donc opté pour un soutien-gorge noir agrémenté d’un motif floral rose que j’ai recouvert d’une chemise en voile noir transparent ornementé de quelques arabesques rose aussi. Les jarretières de mes bas, noirs également, sont ornés d’un ruban en satin encore rose que je trouve du plus bel effet. Je pense qu’il devrait apprécier. A la fois provocant mais, je l’espère du moins, pas vulgaire !
Je porte soudain mes yeux à mes mains. J’allais oublier ! Il m’a aussi demandé « de ne porter ni bijoux, ni parfum ». (Bizarre qu’il ne m’ait pas aussi prié de venir sans maquillage, les yeux et le visage aussi nus que le corps). D’un mouvement preste, j’ôte mes bagues ainsi que ma montre et le bracelet qui entoure mon poignet droit. Ne me reste, hormis mes bijoux intimes qu’il tient à ce que je conserve, plus que mes boucles d’oreilles. Un moment d’hésitation. Puis je décide, dérisoire réaction d’indépendance, de les laisser en place. On verra bien !
Voilà... maintenant je suis telle qu’il le souhaite et qu’il me plaît de l’être pour cet homme que je nomme Lion. Nom qui ne peut que convenir à l’amoureuse des félins que je suis. Va-t-il me dévorer toute crue ? Je souris à cette pensée... Je crois que je me laisserai faire bien volontiers.
Je jette un coup d’œil à l’horloge de la voiture. 19h10. Il est plus que temps pour moi de partir. Hors de question d’arriver en retard pour cette première fois. « Ne soyez pas en retard Marquise, vous subiriez la plus cruelle des punitions, celle de trouver porte close ! » Je ne sais pas s’il aurait le courage de mettre cette menace à exécution mais, dans le doute, inutile d’en prendre le risque. Il a raison ce serait bien pour moi la plus cruelle des déceptions.
Juste avant de démarrer, puisqu’il désire me suivre par la pensée conduisant dans cette froide nuit d’octobre et m’approchant à chaque tour de roues un peu plus de lui à moitié dénudée, je lui téléphone. Sa voix qui résonne doucement dans le creux de mon oreille me fait frémir et me donne un bizarre sentiment de timidité. Je m’agrippe au téléphone comme si c’était une bouée de secours. Il semble si sûr de lui et moi.... moi.... Dans une heure toute au plus, je serai face à cet homme que je n’ai vu qu’une seule fois et..... je ne sais plus vraiment ce que je veux. J’éprouve soudain l’envie fugace de renoncer à cette rencontre, de ne pas prendre ce risque et retrouver le confort douillet et rassurant de mon chez moi. De nouveau, je me demande si cette rencontre est vraiment une bonne idée. Si tout cela n’est pas prématuré. Pour moi.... Pour lui... Je ne sais pas si je suis vraiment prête à entamer une nouvelle histoire qui pourtant, j’en ai l’intuition, seule me permettra de tourner la page définitivement, de passer à autre chose et, surtout... surtout d’arrêter de regarder en arrière et me laisser emplir par la nostalgie de ce qui a été et n’est plus.
J’ai peur aussi de ce qui peut advenir dont on est si peu maître. Ces sentiments qui naissent alors qu’à toute force on s’efforce de les tenir en bride. Pas question de ça bien sûr entre nous. Mais je connais mes fragilités. Mon impuissance aussi. Je sais que parfois les choses sont inéluctables et nous dépassent. Je sais que parfois, quelque désir qu’on en ait, on ne peut rien retenir. Je sais tout cela mais je sais aussi que, quoique j’en pense, rien, maintenant, ne me fera à cet instant me détourner de cet homme qui m’attend et dont je pressens le désir au moins aussi grand que le mien. Je l’ai lu dans ses yeux, comme il a dû le lire dans les miens, cet après-midi de notre première rencontre lorsque nous nous sommes séparés en nous promettant de nous revoir « bientôt » sans plus de précision. Je me dis qu’il est heureux qu’il n’ait pas, ce jour là, poussé plus avant son avantage, qu’il ait su retenir ces mots auxquels j’aurais bien sûr acquiescés mais à quel prix ? Qu’il se soit ainsi démarqué de tous ces autres qui font fi, pauvres ignorants, des joies indicibles de l’attente et du plaisir différé.
Alors que je démarre, je me rappelle qu’il faut que j’achète un paquet de cigarettes. Je pensais le faire dans la journée et puis j’ai oublié. Là, pas moyen de faire autrement si, ce soir, je ne veux pas tomber en panne de cigarettes. Alors que je me dirige vers le tabac, je sens un vent froid s’immiscer sous le long imperméable et en faire voleter les pans autour de mes jambes et les découvrir. A coup sûr, quelqu’un va s’apercevoir que je suis nue sous mon imperméable ! Déjà quand je suis descendue de la voiture, j’ai senti le regard d’un passant se poser sur mes cuisses que mon mouvement avait haut découvertes. J’ai eu beau ramener rapidement le pan de mon imperméable sur elles, je sais qu’il a entraperçu que je ne portais rien dessous. Cela a fait sourire mon côté provocateur mais a fait rougir de confusion la mère de famille. Mais bon ! Cette sensation me trouble et m’émeut profondément.

L’autoroute. Les kilomètres défilent à la fois interminables et si courts. Je sens mon cœur battre de plus en plus fort et une émotion diffuse, troublante m’envahir. Impatience et en même temps appréhension. De quoi ? Je ne sais pas vraiment. Mais elle est là... Et s’il n’était pas à la hauteur que ce que j’ai lu et sais de lui me laisse espérer ? Mais non... J’ai en tête son dernier message. Impossible...
A la radio, en sourdine, des chansons m’accompagnent de leur mélodie langoureuse. Des chansons d’amour remplis de toujours, de je n’aime que toi, tu es tout pour moi... Exactement ce qu’il ne me fallait pas ! Cet homme qui m’attend je ne l’aime pas mais cela n’en rend pas moins prégnant le désir qui m’habite toute entière maintenant et me rend fébrile et m’incite à accélérer.
Pertuis...
Me voilà arrivée à destination. LIRE LA SUITE

Retrouver l’intégralité de ce récit dans le livre (EBook ou broché) paru sous le titre :
Un Lion et une Marquise




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Commentaires

Logo de Henic
mardi 22 mars 2022 à 15h07 - par  Henic

L’art consiste à faire vivre au lecteur des moments ressentis au plus intime de l’écrivain (ou de ses fantasmes, mais quelque chose me dit qu’il y a là plus que des fantasmes...), par des mots choisis, à la fois lyriques et charnels, et placés en alternant habilement crescendos et diminuendos.
En plus, lors de cette première rencontre, les sens de Marquise furent exacerbés jusqu’à la limite, mais n’ont jamais pu s’épanouir en une brûlante apothéose pourtant fort espérée. Et le lecteur en conçoit un plaisir de connaisseur, un peu sadique, s’il se place du côté de Lion qui a admirablement joué sa partition, ou une douloureuse mais si excitante frustration, s’il suit le sillage de Marquise qui sut rester remarquablement stoïque.
Bref : une admirable introduction, à la fois douce et cruelle, mais surtout à la hauteur du désir mutuel des partenaires qui sont tous les deux à un trop haut niveau d’exigence pour se contenter d’un « petit » plaisir rapide.
Merci Christine.